C'était il y a deux ans...
Nous sommes donc parti le dimanche 10 juillet avec une grosse heure
de stress avant de quitter la maison. Après un crochet par Argenteuil
afin de prendre Marie et Hélène (sa maman) à bord de notre taxis, nous
avons embarqués les derniers sur le vol Vietnam Airline direction le BONHEUR.
Arrivés
à l'aéroport d'HCM, nous n'avons, pas pu récupérer nos bagages.
Résultat des courses, nous ne trouvions pas notre compère François (qui
se demandait ce qui nous était arrivé et était parti prendre des
nouvelles) à la sortie et ne savions pas quoi faire. Après avoir enfin
retrouvé François et son amie Hiene, nous prenons un taxis familiale
direction le consulat. Sur la route, HCM nous apparaît petit à petit
avec ses nombreux deux roues, son sens spécial de circulation et les
milliards de Klaxons qui n'en finissent jamais de rugir. Ici, même le
clignotant est sonore. Nous dévorons la ville des yeux et sommes un peu
grogis par tant d'agitation si tôt le matin.
Notre
visite au consulat terminée, direction Vung Tau où nous attend notre
petit bonhomme. Notre remise officielle n'a lieu que le 15 mais nous
tenons beaucoup à cette première rencontre avec notre petit Anatole
Khanh Tuong. La route passe assez vite entre deux assoupissements et
quelques échanges d'impressions et nous nous retrouvons sans nous en
rendre compte à l'entrée de Vung Tau. Après un petit saut à l'hôtel,
nous nous dirigeons enfin vers l'orphelinat et nos petits amours. Nous
sommes sales et fatigués, que vont penser les enfants de nous ???? Ne
connaissant pas VT, nous scrutons les rues à la recherche de l'entrée
grillagée vue sur les photos du forum.
Ca y est, nous venons de la
dépasser… nous nous décrochons le cou à continuer de regarder l'entrée
qui s'éloigne. Hop, demi-tour au bout de la rue, dans un instant nous y
sommes. Les cœur s'accélèrent et les mains deviennent moites (et ce
n'est pas dû à la chaleur ambiante !), j'ai pour ma part l'impression
de glisser doucement vers un gouffre confortable. Le minibus s'arrête
et la grille s'ouvre enfin… Comme d'un fait exprès nous entendons des
pleurs de bébés qui viennent des étages. Nous nous regardons tous et
nous sentons bien que chacun de nous est dans un état second. Allez, on
y va, on se lance vers la merveilleuse aventure.
De jeunes garçons viennent voir qui nous sommes et nous saluent
timidement. Je ne sais plus comment nous avons atteint le bureau de
Trang Dai au premier étage, mais elle semble être en rendez-vous et
nous fait patienter sur la terrasse. Il fait chaud, la fatigue et
l'excitation font un drôle de mélange et je me sens un peu saoulée par
tant de sentiments.
Une fois son rendez-vous terminé, Trang Dai nous
invite chaleureusement à entrer dans son bureau et essaye de placer un
nom sur chacun de nos visages. Sa bonne humeur nous détend et nous nous
installons gauchement sur les banquettes en bois en face et à gauche de
son bureau. Trang Dai sort alors les dossiers de chacun de nous et nous
invite à signer des documents. Boris et moi réalisons avec retard et
surprise qu'elle nous fait l'immense cadeau de nous confier Anatole dès
aujourd'hui ; nous n'osions l'espérer !
Une
fois les papiers singés, nous discutons un peu avec TD quand arrivent
sans bruit du bureau voisin 3 nounous avec 3 petit bouts dans leurs
bras. En tête de cortège un bébé tout surpris, habillé en body-polo
jaune pale plante son regard dans celui de Boris. Au même moment, Marie
me lance "Tiphaine, regarde, c'est ton bébé !". Je le sais, je le sens
mais je reste complètement prostrée sans arriver à réaliser que ce qui
ce passe n'est pas un rêve. Ce petit bouchon a les yeux littéralement
scotchés à Boris et je ne peux que répondre en me levant enfin "regarde
Boris, il te regarde". Et là, les choses s'accélèrent et je me retrouve
avec mon fils dans les bras après qu'il soit passé par ceux de son
papa. Mon fils ! Quel bonheur de pouvoir enfin lui dire "bonjour mon
bébé c'est maman" !!!! Autour de nous, Marie et Hélène sont penchées
sur Lili qui leur fait moulte gazouillis et François, accompagné de
Hiene retrouve enfin Lou-Anh qui sourie à tout va.
Le bonheur et dans
l'air et Trang Dai nous regarde avec beaucoup d'attention et de
douceur. Sent-elle le plaisir que nous vivons actuellement ? En tout
cas, je trouve que nous formons une belle brochette de parents
liquéfiés par le bonheur.
Une fois retombés un peu sur terre, nous
sommes invités par TD à suivre son assistante après nous avoir remis un
sac en plastique contenant un biberon et 2 couches. L'assistant de TD
nous emmène au poste de police puis au comité populaire pour signer des
documents que nous ne lisons même pas car ils sont en vietnamien et
surtout parce que nous n'arrivons pas à détacher notre regard
d'Anatole. Le cérémonial du comité populaire est assez cocasse et nous
posons pour quelques photos devant rideau de velours rouge tiré pour
l'occasion sur lequel est écrit un message que nous ne comprenons pas.
En 1/2 heure tout au plus, ces deux formalités sont faites et nous
déposons l'assistante de TD à l'orphelinat avant de rejoindre notre
hôtel.
Nous nous installons dans nos chambres et essayons de nous
organiser avec nos bébés, surtout Marie et nous qui sommes sans
affaires ni pour les bébés ni pour nous. Boris et moi donnons à Anatole
son premier bib et nous regardons tous les deux avec beaucoup
d'émotion. Nous sommes complètement hagards et ne pouvons même pas
offrir à Anatole un minimum de confort vital. Heureusement, François
est là pour nous dépanner en couches et en lait et me prêtera même un
TShirt pour la nuit le temps que le mien sèche. Marie m'ayant apporté
quelques affaires pour Anatole, je remercie le Ciel de ne pas les avoir
mis dans la valise. Nos deux petits aurons au moins un pij et des
vêtements propres pour demain.
Nous
dînons tous les 6 au restaurant de l'hôtel tandis qu'une des employées
garde les petits dans la chambre de Hiene. A notre retour les trois
amours sont sur le même lit et dorment comme des anges… un souvenir de
chez Thérèse (leur nounou à Saïgon) sans doute. Chacun repart ensuite
vers sa chambre pour une première nuit en famille. La notre sera assez
courte et agitée mais elle restera à jamais dans notre mémoire comme un
nuit magique où nous avons appris a faire connaissance les uns avec les
autres. Notre peu de sommeil est criblé d'images de cette journée
fabuleuse et de sentiments qui me pincent encore le cœur… deux ans plus
tard.